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南京师范大学法语培训学校
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发布时间:2018-06-05编辑:佚名

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法语基督山伯爵中法对照112


Chapitre CXII

Le départ

Les événements qui venaient de se passer préoccupaient tout Paris. Emmanuel et sa femme se les racontaient, avec une surprise bien naturelle, dans leur petit salon de la rue Meslay ; ils rapprochaient ces trois catastrophes aussi soudaines quinattendues de Morcerf, de Danglars et de Villefort.

Maximilien, qui était venu leur faire une visite, les écoutait ou plutôt assistait à leur conversation, plongé dans son insensibilité habituelle.

« En vérité, disait Julie, ne dirait-on pas, Emmanuel, que tous ces gens riches, si heureux hier, avaient oublié, dans le calcul sur lequel ils avaient établi leur fortune, leur bonheur et leur considération, la part du mauvais génie, et que celui-ci, comme les méchantes fées des contes de Perrault quon a négligé dinviter à quelque noce ou à quelque baptême, est apparu tout à coup pour se venger de ce fatal oubli ?

- Que de désastres ! disait Emmanuel pensant à Morcerf et à Danglars.

- Que de souffrances ! disait Julie, en se rappelant Valentine, que par instinct de femme elle ne voulait pas nommer devant son frère.

- Si cest Dieu qui les a frappés, disait Emmanuel, cest que Dieu, qui est la suprême bonté, na rien trouvé dans le passé de ces gens-là qui méritât latténuation de la peine ; cest que ces gens-là étaient maudits.

- Nes-tu pas bien téméraire dans ton jugement, Emmanuel ? dit Julie. Quand mon père, le pistolet à la main, était prêt à se brûler la cervelle, si quelquun eût dit comme tu le dis à cette heure : « Cet homme a mérité sa peine », ce quelquun ne se serait-il point trompé ?

- Oui, mais Dieu na pas permis que notre père succombât, comme il na pas permis quAbraham sacrifiât son fils. Au patriarche, comme à nous, il a envoyé un ange qui a coupé à moitié chemin les ailes de la Mort. »

Il achevait à peine de prononcer ces paroles que le bruit de la cloche retentit.

Cétait le signal donné par le concierge quune visite arrivait.

Presque au même instant la porte du salon souvrit, et le comte de Monte-Cristo parut sur le seuil.

Ce fut un double cri de joie de la part des deux jeunes gens.

Maximilien releva la tête et la laissa retomber.

« Maximilien, dit le comte sans paraître remarquer les différentes impressions que sa présence produisait sur ses hôtes, je viens vous chercher.

- Me chercher ? dit Morrel comme sortant dun rêve.

- Oui, dit Monte-Cristo ; nest-il pas convenu que je vous emmène, et ne vous ai-je pas prévenu de vous tenir prêt ?

- Me voici, dit Maximilien ; jétais venu leur dire adieu.

- Et où allez-vous, monsieur le comte ? demanda Julie.

- A Marseille dabord, madame.

- A Marseille ? répétèrent ensemble les deux jeunes gens.

- Oui, et je vous prends votre frère.

- Hélas ! monsieur le comte, dit Julie, rendez-nous le guéri ! »

Morrel se détourna pour cacher sa rougeur.

« Vous vous êtes donc aperçue quil était souffrant ? dit le comte.

- Oui, répondit la jeune femme, et jai peur quil ne sennuie avec nous.

- Je le distrairai, reprit le comte.

- Je suis prêt, monsieur, dit Maximilien. Adieu, mes bons amis ! Adieu, Emmanuel ! Adieu, Julie !

- Comment ! adieu ? sécria Julie ; vous partez ainsi tout de suite, sans préparations, sans passeports ?

- Ce sont les délais qui doublent le chagrin des séparations, dit Monte-Cristo, et Maximilien, jen suis sûr, a dû se précautionner de toutes choses : je le lui avais recommandé.

- Jai mon passeport, et mes malles sont faites, dit Morrel avec sa tranquillité monotone.

- Fort bien, dit Monte-Cristo en souriant, on reconnaît là lexactitude dun bon soldat.

- Et vous nous quittez comme cela, dit Julie, à linstant ? Vous ne nous donnez pas un jour ; pas une heure ?

- Ma voiture est à la porte, madame ; il faut que je sois à Rome dans cinq jours.

- Mais Maximilien ne va pas à Rome ? dit Emmanuel.

- Je vais où il plaira au comte de me mener, dit Morrel avec un triste sourire ; je lui appartiens pour un mois encore.

- Oh ! mon Dieu ! comme il dit cela, monsieur le comte !

- Maximilien maccompagne, dit le comte avec sa persuasive affabilité, tranquillisez-vous donc sur votre frère.

- Adieu, ma soeur ! répéta Morrel ; adieu, Emmanuel !

- Il me navre le coeur avec sa nonchalance, dit Julie. Oh ! Maximilien, Maximilien, tu nous caches quelque chose.

- Bah ! dit Monte-Cristo, vous le verrez revenir gai, riant et joyeux. »

Maximilien lança à Monte-Cristo un regard presque dédaigneux, presque irrité.

« Partons ! dit le comte.

- Avant que vous partiez, monsieur le comte, dit Julie, me permettez-vous de vous dire tout ce que lautre jour...

- Madame, répliqua le comte en lui prenant les deux mains, tout ce que vous me diriez ne vaudra jamais ce que je lis dans vos yeux, ce que votre coeur a pensé, ce que le mien a ressenti. Comme les bienfaiteurs de roman, jeusse dû partir sans vous revoir ; mais cette vertu était au-dessus de mes forces, parce que je suis un homme faible et vaniteux, parce que le regard humide, joyeux et tendre de mes semblables me fait du bien. Maintenant je pars, et je pousse légoïsme jusquà vous dire : Ne moubliez pas, mes amis, car probablement vous ne me reverrez jamais.

- Ne plus vous revoir ! sécria Emmanuel, tandis que deux grosses larmes roulaient sut les joues de Julie ; ne plus vous revoir ! mais ce nest donc pas un homme, cest donc un dieu qui nous quitte, et ce dieu va donc remonter au ciel après être apparu sur la terre pour y faire le bien !

- Ne dites pas cela, reprit vivement Monte-Cristo, ne dites jamais cela, mes amis ; les dieux ne font jamais le mal, les dieux sarrêtent où ils veulent sarrêter ; le hasard nest pas plus fort queux, et ce sont eux, au contraire, qui maîtrisent le hasard. Non, je suis un homme, Emmanuel, et votre admiration est aussi injuste que vos paroles sont sacrilèges. »

Et serrant sur ses lèvres la main de Julie, qui se précipita dans ses bras, il tendit lautre main à Emmanuel ; puis, sarrachant de cette maison, doux nid dont le bonheur était lhôte, il attira derrière lui dun signe Maximilien, passif, insensible et consterné comme il létait depuis la mort de Valentine.

« Rendez la joie à mon frère ! » dit Julie à loreille de Monte-Cristo.

Monte-Cristo lui serra la main comme il la lui avait serrée onze ans auparavant sur lescalier qui conduisait au cabinet de Morrel.

« Vous fiez-vous toujours à Simbad le marin ? lui demanda-t-il en souriant.

- Oh ! oui.

- Eh bien, donc, endormez-vous dans la paix et dans la confiance du Seigneur. »

Comme nous lavons dit, la chaise de poste attendait ; quatre chevaux vigoureux hérissaient leurs crins et frappaient le pavé avec impatience.

Au bas du perron, Ali attendait, le visage luisant de sueur ; il paraissait arriver dune longue course.

« Eh bien, lui demanda le comte en arabe, as-tu été chez le vieillard ? »

Ali fit signe que oui.

« Et tu lui as déployé la lettre sous les yeux, ainsi que je te lavais ordonné ?

- Oui, fit encore respectueusement lesclave.

- Et qua-t-il dit, ou plutôt qua-t-il fait ? »

Ali se plaça sous la lumière, de façon que son maître pût le voir, et, imitant avec son intelligence si dévouée la physionomie du vieillard, il ferma les yeux comme faisait Noirtier lorsquil voulait dire : Oui.

« Bien, il accepte, dit Monte-Cristo ; partons ! »

Il avait à peine laissé échapper ce mot, que déjà la voiture roulait et que les chevaux faisaient jaillir du pavé une poussière détincelles. Maximilien saccommoda dans son coin sans dire un seul mot.

Une demi-heure sécoula ; la calèche sarrêta tout à coup ; le comte venait de tirer le cordonnet de soie qui correspondait au doigt dAli.

Le Nubien descendit et ouvrit la portière.

La nuit étincelait détoiles. On était au haut de la montée de Villejuif, sur le plateau doù Paris, comme une sombre mer, agite ses millions de lumières qui paraissent des flots phosphorescents ; flots en effet, flots plus bruyants, plus passionnés, plus mobiles, plus furieux, plus avides que ceux de lOcéan irrité, flots qui ne connaissent pas le calme comme ceux de la vaste mer, flots qui se heurtent toujours, écument toujours, engloutissent toujours !...

Le comte demeura seul, et sur un signe de sa main la voiture fit quelques pas en avant.

Alors il considéra longtemps, les bras croisés, cette fournaise où viennent se fondre, se tordre et se modeler toutes ces idées qui sélancent du gouffre bouillonnant pour aller agiter le monde. Puis, lorsquil eut bien arrêté son regard puissant sur cette Babylone qui fait rêver les poètes religieux comme les railleurs matérialistes :

« Grande ville ! murmura-t-il en inclinant la tête et en joignant les mains comme sil eût prié, voilà moins de six mois que jai franchi tes portes. Je crois que lesprit de Dieu my avait conduit, il men ramène triomphant ; le secret de ma présence dans tes murs, je lai confié à ce Dieu qui seul a pu lire dans mon coeur ; seul il connaît que je me retire sans haine et sans orgueil, mais non sans regrets ; seul il sait que je nai fait usage ni pour moi, ni pour de vaines causes, de la puissance quil mavait confiée. O grande ville ! cest dans ton sein palpitant que jai trouvé ce que je cherchais ; mineur patient, jai remué tes entrailles pour en faire sortir le mal ; maintenant, mon oeuvre est accomplie, ma mission est terminée ; maintenant tu ne peux plus moffrir ni joies, ni douleurs. Adieu, Paris ! adieu ! »

Son regard se promena encore sur la vaste plaine comme celui dun génie nocturne ; puis, passant la main sur son front, il remonta dans sa voiture, qui se referma sur lui, et qui disparut bientôt de lautre côté de la montée dans un tourbillon de poussière et de bruit.

Ils firent deux lieues sans prononcer une seule parole. Morrel rêvait, Monte-Cristo le regarder rêver.

« Morrel, lui dit le comte, vous repentiriez-vous de mavoir suivi ?

- Non, monsieur le comte ; mais quitter Paris...

- Si javais cru que le bonheur vous attendît à Paris, Morrel, je vous y eusse laissé.

- Cest à Paris que Valentine repose, et quitter Paris, cest la perdre une seconde fois.

- Maximilien, dit le comte, les amis que nous avons perdus ne reposent pas dans la terre, ils sont ensevelis dans notre coeur, et cest Dieu qui la voulu ainsi pour que nous en fussions toujours accompagnés. Moi, jai deux amis qui maccompagnent toujours ainsi : lun est celui qui ma donné la vie, lautre est celui qui ma donné lintelligence. Leur esprit à tous deux va en moi. Je les consulte dans le doute, et si jai fait quelque bien, cest à leurs conseils que je le dois. Consultez la voix de votre coeur, Morrel, et demandez-lui si vous devez continuer de me faire ce méchant visage.

- Mon ami, dit Maximilien, la voix de mon coeur est bien triste et ne me promet que des malheurs.

- Cest le propre des esprits affaiblis de voir toutes choses à travers un crêpe ; cest lâme qui se fait à elle-même ses horizons ; votre âme est sombre, cest elle qui vous fait un ciel orageux.

- Cela est peut-être vrai », dit Maximilien.

Et il retomba dans sa rêverie.

Le voyage se fit avec cette merveilleuse rapidité qui était une des puissances du comte ; les villes passaient comme des ombres sur leur route ; les arbres, secoués par les premiers vents de lautomne, semblaient venir au-devant deux comme des géants échevelés, et senfuyaient rapidement dès quils les avaient rejoints. Le lendemain, dans la matinée, ils arrivèrent à Chalon, où les attendait le bateau à vapeur du comte ; sans perdre un instant, la voiture fut transportée à bord ; les deux voyageurs étaient déjà embarqués.

Le bateau était taillé pour la course, on eût dit une pirogue indienne ; ses deux roues semblaient deux ailes avec lesquelles il rasait leau comme un oiseau voyageur ; Morrel lui-même éprouvait cette espèce denivrement de la vitesse ; et parfois le vent qui faisait flotter ses cheveux semblait prêt pour un moment à écarter les nuages de son front.

Quant au comte, à mesure quil séloignait de Paris, une sérénité presque surhumaine semblait lenvelopper comme une auréole. On eût dit dun exilé qui regagne sa patrie.

Bientôt Marseille, blanche, tiède, vivante ; Marseille, la soeur cadette de Tyr et de Carthage, et qui leur a succédé à lempire de la Méditerranée ; Marseille, toujours plus jeune à mesure quelle vieillit, apparut à leurs yeux. Cétait pour tous deux des aspects féconds en souvenirs que cette tour ronde, ce fort Saint-Nicolas, cet hôtel de ville de Puget, ce port aux quais de briques où tous deux avaient joué enfants.

Aussi, dun commun accord, sarrêtèrent-ils tous deux sur la Canebière.

Un navire partait pour Alger ; les colis, les passagers entassés sur le pont, la foule des parents, des amis qui disaient adieu, qui criaient et pleuraient, spectacle toujours émouvant, même pour ceux qui assistent tous les jours à ce spectacle, ce mouvement ne put distraire Maximilien dune idée qui lavait saisi du moment où il avait posé le pied sur les larges dalles du quai.

« Tenez, dit-il, prenant le bras de Monte-Cristo, voici lendroit où sarrêta mon père quand Le Pharaon entra dans le port ; ici le brave homme que vous sauviez de la mort et du déshonneur se jeta dans mes bras ; je sens encore limpression de ses larmes sur mon visage, et il ne pleurait pas seul, bien des gens aussi pleuraient en nous voyant. »

Monte-Cristo sourit.

« Jétais là », dit-il en montrant à Morrel langle dune rue.

Comme il disait cela, et dans la direction quindiquait le comte, on entendit un gémissement douloureux, et lon vit une femme qui faisait signe à un passager du navire en partance. Cette femme était voilée ; Monte-Cristo la suivit des yeux avec une émotion que Morrel eût facilement remarquée, si, tout au contraire du comte, ses yeux à lui neussent été fixés sur le bâtiment.

« Oh ! mon Dieu ! sécria Morrel, je ne me trompe pas ! ce jeune homme qui salue avec son chapeau, ce jeune homme en uniforme, cest Albert de Morcerf !

- Oui, dit Monte-Cristo, je lavais reconnu.

- Comment cela ? vous regardiez du côté opposé. »

Le comte sourit, comme il faisait quand il ne voulait pas répondre.

Et ses yeux se reportèrent sur la femme voilée, qui disparut au coin de la rue.

Alors il se retourna.

« Cher ami, dit-il à Maximilien, navez-vous point quelque chose à faire dans ce pays ?

- Jai à pleurer sur la tombe de mon père, répondit sourdement Morrel.

- Cest bien, allez et attendez-moi là-bas ; je vous y rejoindrai.

- Vous me quittez ?

- Oui... moi aussi, jai une pieuse visite à faire. »

Morrel laissa tomber sa main dans la main que lui tendait le comte ; puis, avec un mouvement de tête dont il serait impossible dexprimer la mélancolie, il quitta le comte et se dirigea vers lest de la ville.

Monte-Cristo laissa séloigner Maximilien, demeurant au même endroit jusquà ce quil eût disparu, puis alors il sachemina vers les Allées de Meilhan, afin de retrouver la petite maison que les commencements de cette histoire ont dû rendre familière à nos lecteurs.

Cette maison sélevait encore à lombre de la grande allée de tilleuls qui sert de promenade aux Marseillais oisifs, tapissée de vastes rideaux de vigne qui croisaient, sur la pierre jaunie par lardent soleil du Midi, leurs bras noircis et déchiquetés par lâge. Deux marches de pierre, usées par le frottement des pieds, conduisaient à la porte dentrée, porte faite de trois planches qui jamais, malgré leurs réparations annuelles, navaient connu le mastic et la peinture, attendant patiemment que lhumidité revînt pour les approcher.

Cette maison, toute charmante malgré sa vétusté, toute joyeuse malgré son apparente misère, était bien la même quhabitait autrefois le père Dantès. Seulement le vieillard habitait la mansarde, et le comte avait mis la maison tout entière à la disposition de Mercédès.

Ce fut là quentra cette femme au long voile que Monte-Cristo avait vue séloigner du navire en partance ; elle en fermait la porte au moment même où il apparaissait à langle dune rue, de sorte quil la vit disparaître presque aussitôt quil la retrouva.

Pour lui, les marches usées étaient danciennes connaissances ; il savait mieux que personne ouvrir cette pleine porte, dont un clou à large tête soulevait le loquet intérieur.

Aussi entra-t-il sans frapper, sans prévenir, comme un ami, comme un hôte.

Au bout dune allée pavée de briques souvrait, riche de chaleur, de soleil et de lumière, un petit jardin, le même où, à la place indiquée, Mercédès avait trouvé la somme dont la délicatesse du comte avait fait remonter le dépôt à vingt-quatre ans ; du seuil de la porte de la rue on apercevait les premiers arbres de ce jardin.

Arrivé sur le seuil, Monte-Cristo entendit un soupir qui ressemblait à un sanglot : ce soupir guida son regard, et sous un berceau de jasmin de Virginie au feuillage épais et aux longues fleurs de pourpre, il aperçut Mercédès assise, inclinée et pleurant.

Elle avait relevé son voile, et seule à la face du ciel, le visage caché par ses deux mains, elle donnait librement lessor à ses soupirs et à ses sanglots, si longtemps contenus par la présence de son fils.

Monte-Cristo fit quelques pas en avant ; le sable cria sous ses pieds.

Mercédès releva la tête et poussa un cri deffroi en voyant un homme devant elle.

« Madame, dit le comte, il nest plus en mon pouvoir de vous apporter le bonheur, mais je vous offre la consolation : daignerez-vous laccepter comme vous venant dun ami ?

- Je suis, en effet ; bien malheureuse, répondit Mercédés ; seule au monde... Je navais que mon fils, et il ma quittée.

- Il a bien fait, madame, répliqua le comte, et cest un noble coeur. Il a compris que tout homme doit un tribut à la patrie : les uns leurs talents, les autres leur industrie ; ceux-ci leurs veilles, ceux-là leur sang. En restant avec vous, il eût usé près de vous sa vie devenue inutile, il naurait pu saccoutumer à vos douleurs. Il serait devenu haineux par impuissance : il deviendra grand et fort en luttant contre son adversité quil changera en fortune. Laissez-le reconstituer votre avenir à tous deux, madame ; jose vous promettre quil est en de sûres mains.

- Oh ! dit la pauvre femme en secouant tristement la tête, cette fortune dont vous parlez, et que du fond de mon âme je prie Dieu de lui accorder, je nen jouirai pas, moi. Tant de choses se sont brisées en moi et autour de moi, que je me sens près de ma tombe. Vous avez bien fait, monsieur le comte, de me rapprocher de lendroit où jai été si heureuse : cest là où lon a été heureux que lon doit mourir.

- Hélas ! dit Monte-Cristo, toutes vos paroles, madame, tombent amères et brûlantes sur mon coeur, dautant plus amères et plus brûlantes que vous avez raison de me haïr ; cest moi qui ai causé tous vos maux : que ne me plaignez-vous au lieu de maccuser ? vous me rendriez bien plus malheureux encore...

- Vous-haïr, vous accuser, vous, Edmond... Haïr, accuser lhomme qui a sauvé la vie de mon fils, car cétait votre intention fatale et sanglante, nest-ce pas, de tuer à M. de Morcerf ce fils dont il était fier ? Oh ! regardez-moi, et vous verrez sil y a en moi lapparence dun reproche. »

Le comte souleva son regard et larrêta sur Mercédés qui, à moitié debout, étendait ses deux mains vers lui.

« Oh ! regardez-moi, continua-t-elle avec un sentiment de profonde mélancolie ; on peut supporter léclat de mes yeux aujourdhui, ce nest plus le temps où je venais sourire à Edmond Dantès, qui mattendait là-haut, à la fenêtre de cette mansarde quhabitait son vieux père... Depuis ce temps, bien des jours douloureux se sont écoulés, qui ont creusé comme un abîme entre moi et ce temps. Vous accuser, Edmond, vous haïr, mon ami ! non, cest moi que jaccuse et que je hais ! Oh ! misérable que je suis ! sécria-t-elle en joignant les mains et en levant les yeux au ciel. Ai-je été punie !... Javais la religion, Iinnocence, lamour, ces trois bonheurs qui font les anges, et, misérable que je suis, jai douté de Dieu ! »

Monte-Cristo fit un pas vers elle et silencieusement lui tendit la main.

« Non, dit-elle en retirant doucement la sienne, non, mon ami, ne me touchez pas. Vous mavez épargnée, et cependant de tous ceux que vous avez frappés, jétais la plus coupable. Tous les autres ont agi par haine, par cupidité, par égoïsme ; moi, jai agi par lâcheté. Eux désiraient, moi, jai eu peur. Non, ne me pressez pas la main. Edmond, vous méditez quelque parole affectueuse, je le sens, ne la dites pas : gardez-la pour une autre, je nen suis plus digne, moi. Voyez... elle découvrit tout à fait son visage, voyez, le malheur a fait mes cheveux gris ; mes yeux ont tant versé de larmes quils sont cerclés de veines violettes ; mon front se ride. Vous, au contraire, Edmond, vous êtes toujours jeune, toujours beau, toujours fier. Cest que vous avez eu la foi, vous ; cest que vous avez eu la force ; cest que vous vous êtes reposé en Dieu, et que Dieu vous a soutenu. Moi, jai été lâche, moi, jai renié ; Dieu ma abandonnée, et me voilà. »

Mercédès fondit en larmes ; le coeur de la femme se brisait au choc des souvenirs.

Monte-Cristo prit sa main et la baisa respectueusement ; mais elle sentit elle-même que ce baiser était sans ardeur, comme celui que le comte eût déposé sur la main de marbre de la statue dune sainte.

« Il y a, continua-t-elle, des existences prédestinées dont une première faute brise tout lavenir. Je vous croyais mort, jeusse dû mourir ; car à quoi a-t-il servi que jaie porté éternellement votre deuil dans mon coeur ? à faire dune femme de trente-neuf ans une femme de cinquante, voilà tout. A quoi a-t-il servi que, seule entre tous, vous ayant reconnu, jaie sauvé mon fils ? Ne devais-je pas aussi sauver lhomme, si coupable quil fût, que javais accepté pour époux ? cependant je lai laissé mourir ; que dis-je mon Dieu ! jai contribué à sa mort par ma lâche insensibilité, par mon mépris, ne me rappelant pas, ne voulant pas me rappeler que cétait pour moi quil sétait fait parjure et traître ! A quoi sert enfin que jaie accompagné mon fils jusquici, puisque ici je labandonne, puisque je le laisse partir seul, puisque je le livre à cette terre dévorante dAfrique ? Oh ! jai été lâche, vous dis-je ; jai renié mon amour, et, comme les renégats, je porte malheur à tout ce qui menvironne !

- Non, Mercédès, dit Monte-Cristo, non ; reprenez meilleure opinion de vous-même. Non ; vous êtes une noble et sainte femme, et vous maviez désarmé par votre douleur ; mais, derrière moi, invisible, inconnu, irrité, il y avait Dieu, dont je nétais que le mandataire et qui na pas voulu retenir la foudre que javais lancée. Oh ! jadjure ce Dieu, aux pieds duquel depuis dix ans je me prosterne chaque jour, jatteste ce Dieu que je vous avais fait le sacrifice de ma vie, et avec ma vie celui des projets qui y étaient enchaînés. Mais, je le dis avec orgueil, Mercédès, Dieu avait besoin de moi, et jai vécu. Examinez le passé, examinez le présent, tâchez de deviner lavenir, et voyez si je ne suis pas linstrument du Seigneur ; les plus affreux malheurs, les plus cruelles souffrances, labandon de tous ceux qui maimaient, la persécution de ceux qui ne me connaissaient pas, voilà la première partie de ma vie ; puis, tout à coup, après la captivité, la solitude, la misère, lair, la liberté, une fortune si éclatante, si prestigieuse, si démesurée, que, à moins dêtre aveugle, jai dû penser que Dieu me lenvoyait dans de grands desseins. Dès lors, cette fortune ma semblé être un sacerdoce ; dès lors, plus une pensée en moi pour cette vie dont vous, pauvre femme, vous avez parfois savouré la douceur ; pas une heure de calme, pas une : je me sentais poussé comme le nuage de feu passant dans le ciel pour aller brûler les villes maudites. Comme ces aventureux capitaines qui sembarquent pour un dangereux voyage, qui méditent une périlleuse expédition, je préparais les vivres, je chargeais les armes, jamassais les moyens dattaque et de défense, habituant mon corps aux exercices les plus violents, mon âme aux chocs les plus rudes, instruisant mon bras à tuer, mes yeux à voir souffrir, ma bouche à sourire aux aspects les plus terribles ; de bon, de confiant, doublieux que jétais, je me suis fait vindicatif, dissimulé, méchant, ou plutôt impassible comme la sourde et aveugle fatalité. Alors, je me suis lancé dans la voie qui métait ouverte, jai franchi lespace, jai touché au but : malheur à ceux que jai rencontrés sur mon chemin !

- Assez ! dit Mercédès, assez, Edmond ! croyez que celle qui a pu seule vous reconnaître a pu seule aussi vous comprendre. Or, Edmond, celle qui a su vous reconnaître, celle qui a pu vous comprendre, celle-là, leussiez-vous rencontrée sur votre route et leussiez-vous brisée comme verre, celle-là a dû vous admirer, Edmond ! Comme il y a un abîme entre moi et le passé, il y a un abîme entre vous et les autres hommes, et ma plus douloureuse torture, je vous le dis, cest de comparer ; car il ny a rien au monde qui vous vaille, rien qui vous ressemble. Maintenant, dites-moi adieu, Edmond, et séparons-nous.

- Avant que je vous quitte, que désirez-vous, Mercédès ? demanda Monte-Cristo.

- Je ne désire quune chose, Edmond : que mon fils soit heureux.

- Priez le Seigneur, qui seul tient lexistence des hommes entre ses mains, décarter la mort de lui, moi, je me charge du reste.

- Merci Edmond.

- Mais vous, Mercédès ?

- Moi, je nai besoin de rien, je vis entre deux tombes : lune est celle dEdmond Dantès, mort il y a si longtemps ; je laimais ! Ce mot ne sied plus à ma lèvre flétrie, mais mon coeur se souvient encore, et pour rien au monde je ne voudrais perdre cette mémoire du coeur. Lautre est celle dun homme quEdmond Dantès a tué ; japprouve le meurtre, mais je dois prier pour le mort.

- Votre fils sera heureux. madame, répéta le comte.

- Alors je serai aussi heureuse que je puis lêtre.

- Mais... enfin... que ferez-vous ? »

Mercédès sourit tristement.

« Vous dire que je vivrai dans ce pays comme la Mercédès dautrefois, cest-à-dire en travaillant, vous ne le croiriez pas ; je ne sais plus que prier, mais je nai point besoin de travailler ; le petit trésor enfoui par vous sest retrouvé à la place que vous avez indiquée ; on cherchera qui je suis, on demandera ce que je fais, on ignorera comment je vis, quimporte ! cest une affaire entre Dieu, vous et moi.

- Mercédès, dit le comte, je ne vous en fais pas un reproche, mais vous avez exagéré le sacrifice en abandonnant toute cette fortune amassée par M. de Morcerf, et dont la moitié revenait de droit à votre économie et à votre vigilance.

- Je vois ce que vous mallez proposer ; mais je ne puis accepter, Edmond, mon fils me le détendrait.

- Aussi me garderai-je de rien faire pour vous qui nait lapprobation de M. Albert de Morcerf. Je saurai ses intentions et my soumettrai. Mais, sil accepte ce que je veux faire, Iimiterez-vous sans répugnance ?

- Vous savez, Edmond, que je ne suis plus une créature pensante ; de détermination, je nen au pas, sinon celle de nen prendre jamais. Dieu ma tellement secouée dans ses orages que jen ai perdu la volonté. Je suis entre ses mains comme un passereau aux serres de laigle. Il ne veut pas que je meure puisque je vis.

Sil menvoie des secours, cest quil le voudra et je les prendrai.

- Prenez garde, madame, dit Monte-Cristo, ce nest pas ainsi quon adore Dieu ! Dieu veut quon le comprenne et quon discute sa puissance : cest pour cela quil nous a donné le libre arbitre.

- Malheureux ! sécria Mercédès, ne me parlez pas ainsi ; si je croyais que Dieu meût donné le libre arbitre, que me resterait-il donc pour me sauver du désespoir ! »

Monte-Cristo pâlit légèrement et baissa la tête, écrasé par cette véhémence de la douleur.

« Ne voulez-vous pas me dire au revoir ? fit-il en lui tendant la main.

- Au contraire, je vous dis au revoir, répliqua Mercédès en lui montrant le ciel avec solennité ; cest vous prouver que jespère encore. »

Et après avoir touché la main du comte de sa main frissonnante, Mercédès sélança dans lescalier et disparut aux yeux du comte.

Monte-Cristo alors sortit lentement de la maison et reprit le chemin du port.

Mais Mercédès ne le vit point séloigner, quoiquelle fût à la fenêtre de la petite chambre du père de Dantès. Ses yeux cherchaient au loin le bâtiment qui emportait son fils vers la vaste mer.

Il est vrai que sa voix, comme malgré elle, murmurait tout bas :

« Edmond, Edmond, Edmond ! »

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一、兴趣课程:能理解并运用与自己喜好有关的表达方式和非常基础的语句,可以介绍、询问个人讯息或询问他人基本信息,例如居住地、人际关系、所有物。

二、留学、移民课程:该课程主要针对即将留学国外或有工作需求的零基础及有部分基础的学员,重点讲解必考语法和相关知识点,了解考试结构和考题,集中训练考试内容和技巧,给学员大量补充语法内容及增加大量的词汇量。

三、尊贵VIP课程:适合所有小语种爱好者、出国留学生、出国旅游人群及需要到法语国家定居的人群,主要针对拥有自由时间的学员,上课时间和课程性质一般由学员自行确定,适合零基础或有部分基础想继续深造的学员。




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